Gouvernance démocratique: 15 révélations des enquêtes d’Afrobarometer à découvrir sur le degré de satisfaction et les aspirations des Ivoiriens
Le président Alassane Ouattara a pris la décision de ne pas se présenter aux prochaines élections présidentielles prévues à la fin de l’année 2020. Si cette décision semble être bien apprécié par beaucoup d’acteurs de la communauté nationale et internationale qui y voient « une victoire de la démocratie », d’autres se montrent sceptiques au regard de la situation sur le respect des principes de bonne gouvernance et des manquements notés pour la préparation des prochaines joutes électorales.
Ces 15 révélations des résultats de l’enquête d’Afrobarometer menée en novembre 2019 renseignent sur la situation de la démocratie et de l’État de droit en Côte d’Ivoire durant sa présidence telle que perçue par les Ivoiriens. L‘enquête a interviewé 1.200 adultes ivoiriens. Un échantillon de cette taille donne des résultats avec une marge d’erreur de +/-3% à un niveau de confiance de 95%.
Ces perceptions sont autant importantes pour les acteurs non-étatiques, pour l’État que les candidats aspirant à des fonctions électives.
- Sur la démocratie
- Les Ivoiriens sont fortement attachés à la démocratie (73%) et rejettent en majorité toutes autres formes de gouvernance : régime dictatorial présidentiel 84%, régime de parti unique 81%, régime militaire 78%.
- Seulement 43% des citoyens pensent que le pays est une pleine démocratie ou une démocratie avec des problèmes mineurs contre 34% qui sont assez satisfaits ou très satisfaits.
- Huit Ivoiriens sur 10 (83%) pensent que les élections conduisent « souvent » ou « toujours » à des conflits violents.
- Sur l’État de droit
- Trois-quarts des Ivoiriens (76%) pensent que les citoyens sont traités inégalement devant la loi et 69% estiment que les officiels qui commettent des crimes restent « souvent » ou « toujours » impunis, alors que 56% considèrent que cela n’arrive « jamais » ou « rarement » aux citoyens lambdas.
- Une bonne partie des citoyens n’a ainsi « pas du tout » ou « juste un peu » confiance envers les cours et tribunaux (55%) et l’Assemblée Nationale (55%).
- Les élections en Côte d’Ivoire ne signifient pas que les opinions des citoyens soient prises en compte par les citoyens. En effet, six Ivoiriens sur 10 (60%) estiment que les élections ne permettent pas que les représentants au parlement reflètent les vues des citoyens.
- La majorité des Ivoiriens (67%) estiment qu’ils sont « assez-libre » ou « entièrement libre » d’adhérer à un parti politique et de choisir les élus sans pression (75%). Par contre seulement la moitié de la population (50%) pense être « assez-libres » ou « entièrement libres » de s’exprimer.
- Priorités et Évaluation sectorielle des citoyens de la performance gouvernementale
- Interrogés, les ivoiriens ont choisi par ordre d’importance les secteurs prioritaires suivant : le chômage (20%), la santé (11%), les infrastructures/routes (10%), l’éducation (10%), l’eau (8%), lutte contre la pauvreté (8%), l’insécurité (5%), l’électricité (4%), la gestion de l’économie (4%).
- Évaluant la gouvernance par secteur, l’entretien des routes et la fourniture en électricité fiable sont les secteurs les mieux notés avec respectivement 62% et 61% des Ivoiriens qui estiment que le gouvernement répond « plutôt bien » ou « très bien » à ces préoccupations. En matière de santé ce taux est de 51% suivi par la prévention des conflits (49%), la satisfaction des besoins en éducation (49%), la satisfaction des besoins en eau et assainissement (47%) etc. Les secteurs où la réponse du gouvernement est moins appréciée avec un faible taux de citoyens qui pensent que sa réponse du gouvernement est « plutôt bien » ou « très bien » sont : la lutte contre la corruption (28%), la stabilité des prix (23%), l’amélioration des conditions de vie des pauvres (23%) et la réduction du fossé entre riches et pauvres (18%).
- Dans la prise en compte des besoins des jeunes, sept Ivoiriens sur 10 (69%) pensent (69%) que la réponse du gouvernement est « très mal » ou « plutôt mal ». En 2017, ce chiffre était de (59%) soit une augmentation de 10 points de pourcentage en 2019.
- Moins de la moitié des Ivoiriens (49%) est d’accord ou tout à fait d’accord avec la performance du gouvernement alors que la moitié des Ivoiriens (50%) ont exprimé leur confiance partielle ou entière envers le Président de la République. Cependant, ceci n’est pas le cas de 49% des citoyens.
- Sur la question du cumul des mandats
- Les Ivoiriens sont d’avis à 83% qu’aucun individu ne devrait être autorisé à détenir plusieurs postes.
- Sur la question de la monnaie « ECO »
- Les Ivoiriens ont largement soutenu (82%) le fait que la CEDEAO devrait se doter de sa monnaie unique, et (81%) que la monnaie unique ECO devrait être entièrement contrôlée par les pays de la CEDEAO et non par les puissances étrangères comme la France.
- Sur l’accès à l’information
- Six Ivoiriens sur 10 (63%) soutiennent que l’accès libre aux réseaux sociaux et à l’Internet rend les gens mieux informés et plus engagés comme citoyens, et devraient donc être protégé.
- L’accès à internet chez les adultes Ivoiriens est passé de 40% en 2017 à 53% en 2019.
En résumé, ces résultats des enquêtes d’Afrobarometer montrent que beaucoup d’efforts doivent être consentis par les décideurs afin d’être en phase avec les aspirations des citoyens. Il convient de retenir ainsi qu’il ne peut y avoir de véritable démocratie si les opinions des citoyens ne sont prises en compte et si les décisions prises ne reflètent pas les aspirations des peuples en matière de développement inclusif. De la même manière, si les priorités des décideurs politiques ne sont pas en phase avec ceux des citoyens, si les attentes de la majorité ne sont pas satisfaites, la démocratie risque de n’être qu’un vain mot et l’apanage des élites. Etant donné que la démocratie est « le pouvoir du peuple », les dirigeants porteurs de mandat du peuple ne devraient-ils pas être des serviteurs totalement redevables à celui-ci? Lien utile : >> Résultats de la 1ère dissémination de la 8ème serie des enquêtes d'Afrobarometer en Côte d'Ivoire <<
Coordinateur de la Communication Francophone chez Afrobarometer